Se nourrir aux États-Unis : de l'assiette au ventre, des sens à l'esprit

 

Pour tout nouvel arrivant dans une contrée jusque là seulement imaginée, tantôt rêvée, mythifiée, détestée, ou tout simplement représentée sur la base d'informations recoupées, le choc du dépaysement éveille tous ses sens à la découverte de son nouvel environnement. Le moindre composant de ce nouveau monde est scrupuleusement passé au crible de sa vue, son odorat, son ouïe, son toucher ou son goût. La nourriture ne déroge pas à cette règle et en est peut-être l'un des premiers champs d'application. L'attention prêtée à l'art culinaire local lui permet de se faire une première impression sur la culture et le mode de vie des autochtones.

Nous espérons que notre expérience nous permette de passer des choses vues, entendues… ou goûtées, à une meilleure compréhension de l'Amérique contemporaine, à travers quelques uns de ses débats (ou non-débats) de société : de l'obésité aux OGM en passant par la malbouffe. Quand se nourrir aux États-Unis devient l'objet d'une modeste relation de voyage…

Choses vues, entendues… ou goûtées

A peine arrivés, le premier souci est de satisfaire à l'un de nos besoins primaires : manger. C'est aussi un réflexe de survie. C'est que les collations dans l'avion mettent déjà sérieusement nos estomacs bien français à rude épreuve : une poignée de cacahuètes arrosée d'un jus d'orange ou d'un coca, auxquels succède une espèce de pain pita rempli d'une sorte de crème fromagée ; tout cela au rythme infernal d'un service toutes les deux heures.

Première réaction donc : ouvrir nos mirettes, nos écoutilles et nos papilles à la pratique culinaire de nos très chers hosts. Franchi le pas de la cuisine, un premier apriori s'effondre : des bananes, des pommes, et même une orange (au plus fort de la mauvaise récolte californienne !) jaillissent de la corne d'abondance en plastique qui trône sur le buffet. Mais l'heure du premier repas venue, l'inquiétude reprend le dessus. Ce sera un dîner rapide et léger : deux tranches de pain, de la mayonnaise en tube ou du beurre décongelé, une feuille de salade, une tranche de rosbif ou de turkey. Et pour les plus fous, une rondelle de tomate pourra même être rajoutée.

Par contraste, le cordon bleu digne de la toque étoilée se distingue par son aptitude à quadrupler son temps de travail, soit de passer de 5 à 20 minutes montre en main pour œuvrer derrière les fourneaux. Un repas de fête sur lequel on ne tarira pas d'éloges tout au long de la dégustation pourra donc se composer d'une pièce de saumon passée au four " au naturel " (comprenez dépourvu d'atours liliacées et autres condiments à faire pleurer un bon mangeur) accompagnée de ses pommes frites surgelées et son choux fleur (ingrédient ayant demandé la plus lourde et longue attention lors de sa cuisson à l'eau) nappé d'une délicate soupe au Cheddar condensée (préférez la boîte de 305g, on la dit plus goûtue), le tout garni d'une salade prélavée en sachet certifiée première fraîcheur.

Le gastronome averti relèvera la composition relativement équilibrée de ce repas malheureusement expérimenté qu'à deux reprises (l'alternance des recettes s'épuisant au bout d'un bon mois). Au total, 4/5ème des plats ingurgités correspondent au sandwich décliné sur toute la gamme des mortadelles et autres salamis existants assortis de sauces toutes plus denses (mais garanties " low fat ") les unes que les autres. Mais ne dit-on pas que l'on apprécie toujours mieux les choses rares ?

Peler une tomate, faire revenir des oignons, réduire la sauce, émincer des blancs de volaille puis les faire mariner… autant de termes abscons qui hérissent le poil du pragmatisme américain. Risquons un " peeling the cucumber "… Nous devons ici confesser que la difficulté à traduire ce jargon nous a incités à écrire cet article en français. Vous avez dit " cuisiner " ? Qui ose donc blasphémer au pays de l'efficacité et de la rentabilité ? Les ravages du taylorisme se font sentir jusqu'au fond du bac à légumes.

Une première nuance doit ici être apportée ; car si la succulence des mets proposés dépend en grande partie des qualités de chaque cuistot (nos expériences sont en la matière très diverses), il faut souligner aussi l'importance de la source d'approvisionnement. Faire son marché à Westpoint Market à Akron ou chez Heinen's (équivalents de notre Bon Marché parisien) à Hudson, bourgade huppée de la banlieue d'Akron, n'est pas tout à fait pareil que faire son supermarché à Acme, le Auchan local. Comme en France, l'accès à la bonne bouffe est une affaire de gros sous. Pas besoin de nous éterniser sur les effets de la grande distribution sur la qualité de notre alimentation. Disons simplement que la nourriture est ici aussi un outil de distinction sociale : on flâne dans son Heinen's préféré au son des Quatre Saisons de Vivaldi en passant du rayon des vins italiens à celui des fromages français où l'on peut tester le prononcé Maroual, quand on traînera des pieds dans le Acme du mall le plus proche au rythme de la dernière soupe R&B, sous l'effet enivrant de la javel fraîchement passée.

Autre odeur, autre goût ; un lieu incontournable, le temple du manger efficace et productif : le fast food. Passage obligé, il est partout présent : en ville, à la campagne, sur la route pour vous rendre de l'une à l'autre, au mall en déposant son chèque à la banque et sa lettre à la poste (le tout en restant confortablement assis dans sa voiture), jusque sur le campus de la fac et même… au match de basket !

Pendant que les 10 joueurs mouillent le maillot, les gentils spectateurs-supporters-consommateurs s'empiffrent joyeusement d'ailes de poulet panées et autres hot-dogs odorants. La tension est à son comble lorsque l'une des deux équipes, de laquelle dépend l'offre promotionnelle du moment, est sur le point d'atteindre les 100 points. La scène orwellienne à laquelle il nous a été donné d'assister avait pour principal protagoniste Chalupa, menu phare de Taco Bell et dont tout le public scandait le nom. On ne sait plus trop si la carotte (passez-nous ce jeu de mot diététique) visait à galvaniser la foule dans son soutien aux joueurs… ou si LeBron James et ses acolytes étaient là pour sacrifier au dieu Chalupa.

Une fois sortis du stadium, l'ennui revient aussi vite que Cleveland s'éloigne et Akron s'approche. Comment tuer cet ennui dans une ville quasi-déserte ? Ici, la sociabilité est avant tout consommatrice. Que l'on soit riche ou pauvre, chacun cède à son réflexe consommateur. Les grandes enseignes sont des marqueurs sociaux de l'espace : Starbuck's, Mc'Do, et autres Burger King sont omniprésents, dans tous les lieux de la grande consommation populaire. La distinction sociale se fait dans les restos branchés, pour la plupart semble-t-il (et un peu paradoxalement ?) dans le downtown. Consommé consumé I'm lost ; dans le dérisoire, dans les accessoires, I'm lost… alors je trompe l'ennui avec mon milkshake ou mon chocolat Starbuck's. Le vieux truc éprouvé mais pas encore éculé de l'incitation à la consommation en donnant le sentiment que moi consommateur, j'entube le vendeur, marche toujours aussi bien : en gardant le même verre, je peux en redemander une ch'tite goutte plusieurs fois en payant bien moins cher. Economies d'échelle obligent. Le relatif isolement et les grandes distances ne favorisent pas non plus l'activité physique. L'effervescence urbaine permettrait-elle de palier, au moins en partie, ce problème de malnutrition ? Il nous a semblé que le New Yorkais était plus svelte que l'Akronien…

Quoi qu'il en soit, le résultat de cette alimentation surprotéinée est flagrant : que l'on prenne la taille au garrot ou au collet, le gabarit local n'est décidément pas le même ici qu'en Europe. Et nos amis semblent éprouver des difficultés à critiquer leurs modes alimentaires… et leur éducation à l'alimentation. Le corps enseignant conspue la cantine scolaire, considérée à juste titre comme infecte. Mais un Mardi Gras pourra être célébré sur l'initiative des profs par… euh… comment l'appeler : un lunch tardif ? Un goûter ? Un dîner anticipé ? Bref, c'est organisé à 16h et, une fois n'est pas coutume, les élèves mangent des parts de pizzas, des pilons de poulet panés, des pommes frites, de la salade, des gâteaux crémeux et chocolatés.

On se donne bonne conscience en buvant de la boisson gazeuse " diet ", en assaisonnant sa salade d'une sauce 3 fromages " 50% less fat than regular dressing ". On pourra tout à fait se faire plaisir tout en respectant les critères WeightWatchers : une soupe à l'oignon (en boîte de préférence) + une tranche de pain dans la soupe + une tranche de fromage américain par-dessus + des chips trempés dans une sauce blanche à l'oignon = 8 points WeightWatchers seulement (sur 20 autorisés pour la journée) !!

L'Amérique semble se fourvoyer dans la paranoïa, dans la skizophrenia… I'm lost… Alors tous les paumés débarqués dans cette Amérique paradoxale adoptent la stratégie qu'ils peuvent. Certains vont piétiner le tapis roulant au centre sportif en espérant convertir ces super-protéines en super-muscles ; d'autres se réfugient dans une ascèse très cathare en dévalisant les magasins de leurs pommes ; d'autres encore tentent l'intégration par l'intériorisation des coutumes locales et en s'abandonnant aux joies des très typiques et graisseux hamburgers.

Mais au fait, et le débat local sur ces questions ? Le débat ? Quel débat ? Les grandes entreprises font tout pour améliorer la qualité nutritive de leurs produits. Subway est un de ces bons élèves, soucieux de la santé des Américains.

Les OGM ? " Aucun Américain ne mange d'OGM. Il n'y a que des expérimentations. Et puis, c'est pour aider les pays sous-développés à se nourrir. "

Peut-être pouvons-nous prétendre, très humblement cela va sans dire, relancer le débat, le simple questionnement, après ce constat d'une édifiante certitude quand tout indique qu'il y a pourtant un problème. Osons une mise en perspective " historique "… probablement une déformation professionnelle.

Obésité, un mal national… et international

L'année 1999, un pamphlet fit grands remous dans une mare bien calme auparavant, même si elle demeurait déjà floue : le journaliste Eric Schlossberg faisait paraître un virulent réquisitoire, Fast Food Nation, qui donnait des États-Unis l'image d'une nation devenue obèse… Or il en accusait l'industrie de l'alimentation, fautive de prendre cyniquement les enfants pour cible des campagnes de publicité, un peu comme les chaînes de McDonald's agencent des espaces de jeux dans leurs établissements. Deux ans plus tard, le mois de décembre 2001 voit le Ministère de la santé américain publier une incantation rhétorique en forme d'un appel à l'action, déclarant que plusieurs centaines de milliers de décès par an seraient dus à l'obésité, qui coûterait 117 milliards de dollars à l'Oncle Sam.

L'obésité est devenue une épidémie mondiale mais c'est donc aux États-Unis que le mal est le plus visible, c'est là que l'on peut analyser le plus clairement ses déterminants. Même si les scientifiques et nutritionnistes débattent sur l'influence des gènes, même si la sédentarité joue un rôle important, l'obésité dépend crucialement des comportements alimentaires.

En 2004, un rapport établi par l'Agence financière de l'Ambassade de France à Washington, portant justement sur " L'obésité aux États-Unis, Enjeux économiques et défis politiques " (Anne-Sophie Cérisola, Jacques Mistral), démontrait les liens directs entre l'industrie et les effets d'une alimentation déséquilibrée : beaucoup, beaucoup trop de graisses additionnelles et de sucres ajoutés. Le tout est lié à une transformation de l'offre alimentaire, qui a suscité la surproduction de maïs, l'utilisant tel un expédient commode parce que très rentable, par et pour les industries transformatrices, ainsi que les chaînes de restauration.

Et puisqu'il est question de cette offre alimentaire, il est nécessaire de se pencher sur le côté " Input " de l'analyse, les comportements alimentaires.

Les Américains consacrent une part de moins en moins importante de leur budget aux dépenses d'alimentation. De 1929 à 2001, celles-ci sont passées de 23,5 % à 10,2 %. Bien entendu, la conséquence est connue, il s'agit de l'augmentation des niveaux de vie et des progrès de l'agriculture et de l'industrie agro-alimentaire. Mais il y a bien plus éloquent. Ces dépenses étaient en 1929 consacrées pour 86 % à l'alimentation consommée à la maison, proportion réduite à 74,6 % en 1970, et à 60 % en 2001.

Il convient de se demander quelles sont les conséquences de ces changements dans l'absorption des calories. Or il est d'emblée un révélateur important : l'absorption de calories est un indicateur statistique qui sort des préoccupations de la comptabilité nationale… Pour appréhender ceci, il faut recourir à des enquêtes spécialisées du Département américain de l'Agriculture, qui mesure les calories alimentaires telles qu'elles sont recensées par les consommateurs eux-mêmes, et de l'autre côté, les montants résultant des ventes alimentaires au détail.

Venant de la demande, donc, en 1977, les hommes déclaraient consommer en moyenne 2.080 calories/jour, et en 1996, ils en ingéreraient 2.347, soit une augmentation de 268 calories quotidiennes. Les femmes sont passées de 1.515 à 1.658 calories par jour.

Cette augmentation vient des grignotages entre les repas. Les hommes, entre 1077 et 1996, ont vu une hausse de 90 % de leur consommation de snacks, passant de, quotidiennement, 261 à 501. Pendant la même période, les femmes sont passées de 186 à 346 calories, hausse de 112 %.

Venant de l'offre, l'offre moyenne de nourriture par personne est passée de 3.200 calories par personnes en 1978, à 3.900, soit une addition de 700 calories…

Bref, l'alimentation est déséquilibrée, pour deux raisons : des prises alimentaires trop fréquentes et trop riches, ainsi qu'une proportion trop élevée d'acides gras saturés et de sucres additionnels. Et les prix à la consommation y aident grandement, bien entendu…

Tableau 1 : La consommation comparée aux recommandations de la pyramide alimentaire en 2000

Source : Economic Research Service, USDA

Tableau 2 : Prix à la consommation : hausse de 1985 à 2000 (%)

Source : Economic Research Service, USDA

Effectuons donc un retour sur ladite " nouvelle économie alimentaire ", dans laquelle le maïs devient l'alimentation de base non seulement du bétail et de la volaille, mais aussi de l'homme, car il est également transformé en isoglucose (high fructose corn syrup), qui devient rapidement la principale forme de sucre consommée aux États-Unis. Or les chaînes de fast food ne sont pas restées sans tirer profit de ceci. En fait, l'accroissement de la taille des portions servies dans ces chaînes de restaurants est une belle histoire de manipulation du consommateur.

Prenons en exemple le cas de Taco Bell. En 1983, deux entrepreneurs sont placés à la tête de l'enseigne, en perdition critique. Ils ont été les premiers à saisir l'opportunité que représentait la chute de leurs coûts d'approvisionnement : la part des coûts dits fixes dans un menu fait qu'un supplément alimentaire ne représente pour le producteur qu'un coût additionnel clairement marginal. Un " surplus " de nourriture, en comparaison de l'offre de la concurrence, mais ici vendu donc à un prix tout juste plus élevé, fait que le profit unitaire est démultiplié, et que le consommateur se perçoit comme un remarquable gagnant parce qu'il a ingurgité davantage, " a great value for a few money ". Ensuite la concurrence a joué son rôle, et le raisonnement se décline sur tout, absolument partout aux États-Unis :

- La barre chocolatée a vu sa taille augmenter 4 fois depuis 1970,

- La boîte de soda est passée de 8 à 20 onces en 25 ans,

- La portion de Cheesecake Factory s'est faite dantesque, contenant à elle seule 718 calories,

- Le fameux Big Mac et sa super-portion de frites,

- Last but not least, la montagne de produits de la mer chez Red Lobster, à… 2.178 calories par portion.

De surcroît, et depuis l'an 2000, l'obésité est devenue un véritable problème de société aux États-Unis. La porte des prétoires a été franchie… Cela inquiète les compagnies d'assurances qui redoutent de se voir confrontées à un problème de santé comparable à l'amiante ; en outre, les dépenses de santé sont très largement impactées à la hausse par l'obésité et ses désagréments induits.

En 2002, un groupe d'adolescents new-yorkais saisit la justice contre McDonald's qu'ils vilipendent pour les avoir rendus obèses et dès lors menacés de maladies graves. C'est donc l'affaire de la responsabilité personnelle contre la responsabilité des corporations et firmes alimentaires.

En février 2003, le juge Robert W. Sweet rend verdict de non-lieu. Au premier abord, victoire grandiose de McDonald's, puisque le juge rejette la responsabilité de leur obésité sur les plaignants, arguant de la logique élémentaire : manger encore et encore, avec une fréquence déroutante, tous ces Big Mac, n'est notoirement pas le meilleur moyen de garder une belle ligne.

Néanmoins le juge introduisit un paragraphe dans son jugement final, donnant une nouvelle stratégie contre McDonald's. C'est-à-dire une plainte basée sur l'impossibilité d'exercer leur responsabilité individuelle en toute connaissance de cause. En substance, le juge note que le " hamburger " servi par McDonald's n'est pas un steak commode, mais un produit quelque peu monstrueux dont la composition exacte est impossible à connaître. Le juge y déclara même que les produits vendus par McDonald's sont " altérés de façon si radicale que leurs attributs malsains ne peuvent être que méconnus du consommateur moyen... [...] Un Chicken McNuggets n'est pas seulement du poulet frit, c'est une combinaison digne de McFrankestein d'éléments inconnus dans une cuisine familiale [...] ", recelant d'une inquiétante caverne d'Ali Baba de produits génétiquement modifiés. Affaire en cours car la plainte fut reformulée en ce sens.

Genetically Modified Foods : que du bon !

Les OGM aux États-Unis… dossier sentant le soufre et les pratiques de déontologie alimentaire bien suspicieuses. D'après le rapport 2006 du très respecté et consensuel International Service for the Acquisition of Agri-biotech Applications (ISAAA), les États-Unis cultivent 54,6 millions d'hectares d'OGM (soja, maïs, coton, colza, courge, papaye, luzerne, p. 4) contre moins de 0,05 million d'hectares consacrés au maïs pour la France (16ème rang). Les États-Unis sont de très loin le 1er pays producteur d'OGM (p. 6).

Il faut savoir que la mise sur le marché aux États-Unis des OGM repose essentiellement sur la responsabilité des industriels plus que sur la réglementation, bien qu'une évaluation rigoureuse soit menée par les autorités fédérales :

- USDA, le Département de l'agriculture,

- FDA (Foods and Drugs Administration) appartenant au ministère de la santé,

- EPA (Environnement Protection Agen) dépendant directement de la Maison Blanche.

Chacune de ces agences se prononce sur un sujet bien précis. Or la FDA s'est prononcée contre l'étiquetage des produits génétiquement modifiés car elle les considère comme assimilables aux produits traditionnels… Ceci s'explique par ce que l'on nomme " l'Équivalence substancielle " : à partir de ce concept, un produit transgénique est considéré équivalent à son homologue conventionnel dès lors que les analyses chimiques de ses constituants sont identiques. C'est-à-dire qu'une fois ces analyses chimiques effectuées, aucune étude scientifique de toxicité, à savoir d'impacts sur la santé humaine et animale, n'est obligatoire. Le système de réglementation a permis depuis 1987 d'effectuer 3.332 essais en champs portant sur 48 espèces, la culture de 30 variétés de plantes transgéniques et l'autorisation de consommation de plus de 20 espèces, la culture de 8,1 millions d'hectares en 1997 soit 63 % du total mondial.

Un seul, et en l'occurrence fondateur, exemple particulièrement développé donnera à chacun, souhaitons-le modestement en tout cas, de quoi pratiquer son esprit critique.

En 1994, était autorisé aux États-Unis le premier aliment génétiquement modifié, la tomate " FLAVR / SAVR " à mûrissement retardé de l'entreprise Calgene. Deux années passent, et c'est alors qu'après des difficultés dans la chaîne de distribution et un échec commercial causé par, officiellement, un " mauvais goût ", cette tomate fut retirée du marché. Peu importe néanmoins, puisque le processus d'autorisation d'aliments transgéniques était désormais fermement mis en place.

Il fallut attendre 1998 pour que le premier scandale de ce processus d'autorisation fût révélé. Un procès fut intenté contre la FDA par un groupe de défense de consommateurs, qui a abouti à la condamnation de cet organisme. Celle-ci obligea notamment la FDA à rendre publics les rapports internes montrant que l'autorisation délivrée en 1994 pour la commercialisation de la fameuse tomate allait à l'encontre de l'avis des scientifiques consultés pour évaluer la sécurité alimentaire de cet aliment. Ces scientifiques, en effet, affirmaient que les études sanitaires effectuées par Calgene étaient très insuffisantes mais surtout, laissaient craindre des impacts négatifs sur la santé des personnes qui consommeraient cette tomate transgénique.

Depuis les choses sont bien plus compliquées encore, les firmes impliquées dans les OGM disposant de " leurs " propres scientifiques…

En somme c'est un imposant problème politique qu'est devenue l'obésité. Et le nœud est gordien pour le gouvernement fédéral, écartelé dans ses contradictions entre le soutien à l'agriculture, secteur au sein duquel s'illustre tout particulièrement l'industrie sucrière, la puissance des lobbies agro-alimentaires et les exigences de santé publique qui deviennent de plus en plus pressantes, en particulier parce que les enfants sont de plus en plus massivement touchés. Et puisqu'il faudra choisir entre le libéralisme et le bien public, il est des questions à se poser sur les orientations qui seront décidées par le gouvernement central, ainsi que sur la façon dont elles seront menées d'ailleurs.

Et au vu de tout cela, on en regrette les joies de l'assiette en France ; on s'inquiète aussi des dérives dont nous ne sommes pas à l'abri.

Par Loïc et Hicham

 

 

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Akron - Ohio

2007

 

 

 

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